LES EXPRESSIONS ESTHETIQUES
DU CORPS
------------Introduction
Parmi
les caractéristiques physiques contribuant le
plus à l'attrait ou à la répulsion,
certaines sont incontrôlables du fait de leur prédétermination
(forme du corps ou des certaines parties du corps, teint,
texture des cheveux, taille, etc) ou de leur lien à des événements
indépendants de la volont des personnes
victimes (diverses atteintes à l'intégrité corporelle
sous l'effet de maladies, d'accidents, de torture, de
guerre, etc).
Mais
la plupart des attributs physiques définissant
notre apparence sont aussi modifiables volontairement.
Le corps est tantôt dilaté ou affiné par
le jeu des formes et couleurs vestimentaires, tantôt élevé par
des talons et tantôt rajeuni par d'habiles teintures.
Notre époque
correspond à une complexe manipulation de notre
apparence dont la finalité est essentiellement
esthétique. Les métamorphoses corporelles
d'aujourd'hui sont consacrées presqu'exclusivement à l'embellissement.
Mais pourquoi de telles transformations quasi obsessionnelle
? La beauté naturelle ne serait -elle qu'apparente
? N'y a-t-il pas des raisons narcissiques cachées ?
Les
modifications de l'apparence
Celles-ci
sont dues soit à des objets et matériaux
extérieurs comme les vêtements, les ornements,
soit à des artifices peu durables comme le maquillage,
la coiffure et les peintures corporelles. Ce sont les
plus fréquentes actuellement. Les transformations
directement liées au corps telles la perforation
des oreilles, du nez ou des lèvres, les mutilations,
les tatouages ou la chirurgie esthétique sont
autant des pratiques autoplastiques de l'apparence.
Par
des moyens objectifs, hommes et femmes essayent de changer
leur image du corps et par-delà, l'image d'eux-mêmes.
Ces transformations seraient en elles-mêmes source
de plaisir, par un jeu permanent d'extension et de rétraction
du corps, qui nous permet de triompher de nos limites
corporelles, imaginaires parfois, et d'en maîtriser
les changements. Ce plaisir est d'ordre narcissique et
la modification volontaire, voire obsessionnelle de l'apparence
est considérée comme une forme de communication
non verbale qui véhicule plusieurs informations à propos
de soi (look me, love me, admire moi, contemple moi..). C'est
un ensemble de signaux à propos du groupe d'appartenance,
de l'âge, du sexe, du statut, du rôle social
et de la personnalité de l'émetteur ou
de l'émettrice. Plusieurs messages sont ainsi
convoyés par l'aspect physique métamorphosé d'un
individu.
Ce
corps "public" destiné au regard
des autres est très probablement un indicateur
des sentiments (complexes personnels) que l'individu éprouve
vis-à-vis de son corps et de lui-même et
des sentiments et perceptions qu'il désire susciter
chez les autres.
Les réponses
sociales à l'apparence d'autrui obéissent à des modèles
relativement stéréotypés dans les cultures actuelles.
Les soins des cheveux qui sont coupés, rasés, frisés,
nattés, teints, colorés, tressés diversement sont sans
doute dûs à leurs connotations valorisantes. Apparaître
le plus beau, la plus belle possible est un moyen très sûr pour
obtenir des gratifications sociales multiples. Ainsi les femmes bien "arrangées" sont
ou croient être jugées plus équilibrées, plus intégrées
socialement, plus attrayantes et plus féminines que les autres qui peuvent être
dépréciées par une certaine extravagance ou négligence.
Pourquoi
ces transformations ?
Chaque
individu est quotidiennement confronté à un
corps de référence imaginaire et idéalisé.
Toute différence par rapport à ce modèle
(petite taille, rides, peau noire, cheveux crépis,
calvicie, barbes en désordre, ongles longues;
cou nu) est ressentie par beaucoup comme une tare. D'où un
malaise profond vis-à-vis de notre propre corps,
malaise narcissique caractéristique de notre société congolaise
et de notre époque, et qui touche particulièrement
les filles et les femmes, mais aussi les stars et certains
jeunes gens. La relation à notre corps est marquée
par la non acceptation de notre image corporelle réelle.
Chacun tente de la changer, de l'améliorer par
tout un jeu d'artifices. La fréquentation des
salons de beauté et le nombre de ceux-ci ne cessent
de croître inexorablement.
Pourquoi
des réactions si favorables à la beauté ?
La
beauté est inductrice d'un plaisir d'ordre esthétique
pour certains, et d'ordre érotique pour d'autres.
La beauté exerce une influence déterminante
et ce, pour des sujets d'âges très variés. Ce
qui est source de plaisir et donc gratifiant est à son
tour récompensé. C'est ce qui justifie
les attitudes positives et appréciatives envers
la beauté.
La
beauté est une valeur sociale, au même titre
que d'autres valeurs culturellement désirables.
Chacun a tendance à rechercher un partenaire
beau. La beauté d'une amie, d'un partenaire est
récompensée car elle est socialement valorisée;
cependant la valeur de la beauté féminine
est traditionnellement très supérieure à celle
de la beauté masculine. Les hommes recherchent
davantage la beauté féminine pour augmenter
la leur et plus ou moins vice-versa.
La
beauté est stimulante, c'est une source attrayante
qui éveille plus de curiosité et d'intérêt.
La beauté d'autrui provoque en nous des réactions
neuro-végétatives qui s'accompagnent d'un éveil
cortical. On observe que les visages les plus beaux sont
facilement perçus et mémorisés.
Ce n'est donc pas un stimulus neutre, il est chargé d'affects
positifs.
Il
est un fait que la beauté féminine est
généralement plus récompensée
que la beauté masculine. Le rôle féminin
traditionnel se définit par divers attributs dont
le charme, la douceur, la coquetterie. Cependant, l'usage
exagéré des marques et des masques chez
les femmes donne à penser que la beauté d'une
femme est d'abord d'ordre subjectif. Aussi la société attend
des femmes, dès leur plus jeune âge, qu'elles
mettent en valeur leur apparence physique. Si donc les
femmes les plus attrayantes sont les plus belles, les
hommes préférés sont les plus populaires,
les intellectuels, les mieux placés socialement
et économiquement et non pas nécessairement
les plus beaux.
Conclusion : La
perception de soi
L'auto-estimation
de sa propre beauté ou la satisfaction ressentie
par un sujet vis-à-vis de son corps se révèlent
comme des mesures les plus prédictives de la perception
de soi. En effet, la satisfaction vis-à-vis
de son propre corps est significativement liée à la
satisfaction vis-à-vis de soi, ceci plus encore
pour les femmes que pour les hommes. Il y a une relation
entre satisfaction vis-à-vis de son corps et estime
de soi, car la perception de soi dépend en priorité de
la manière de percevoir son corps.
Or,
l'acceptation de son propre corps dans l'ensemble et
dans ses détails est un processus très
déterminant de la perception de soi, particulièrement
pour les femmes. La perception de soi des sujets beaux
est positive, mais ils ne recourent pas moins aux matériaux
extérieurs et aux artifices passagers pour paraître
davantage. Les sujets non attrayants en usent davantage
encore pour parer les jugements négatifs. La
beauté est un privilège virtuel pour les
femmes jeunes qui leur confère un choix de partenaires
potentiels plus étendu, un niveau d'aspiration
plus élevé, etc.
Cependant,
l'usage modéré ou immodéré mais
combiné des artifices et produits de beauté montre
que l' image de soi ne procure jamais assez de satisfaction à la
femme. Malgré les effets nocifs de certains
produits, son image de soi paraît dépendre
de la manière dont son corps s'acquitte de sa
fonction séductrice grâce aux multiples
produits de beauté. Les usagers de ces produits
dangereux craignent plus la "non beauté" que
le cancer éventuel.